Interview d'experts - Le point de vue de Michel Léger,
Membre fondateur et président de l'Institut Messine,
président du conseil de surveillance de BDO France,
sur le financement obligataire des PME

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Comment situez-vous le placement privé obligataire dans le panel des solutions de financement des PME ?

En matière de financement des PME, on doit d’abord préciser si on parle de financement equity ou de financement de dettes : dans le secteur du financement equity on voit se développer beaucoup de fonds d’investissement, ce secteur continue à monter en puissance, plus que celui des introductions en bourse qui deviennent extrêmement rares. Dans le secteur du financement de dettes, il faut remonter dix ans en arrière, au moment de la crise de 2008, à la suite de laquelle il y a un peu eu une pénurie de crédit traditionnel bancaire, ce qui a favorisé la montée de nouvelles formes de financement, comme le financement obligataire. Aujourd’hui, les banques ont rouvert un peu les vannes du crédit, et dernièrement une statistique, affirmait que la part du financement bancaire dans l’économie PME était encore de 60% (il y a 10 ans, elle était tombée à 50%). Aujourd’hui, donc, nous restons dans un pays assez atypique, car à la différence de la plupart des pays étrangers, le réseau bancaire, en France, occupe encore une place importante dans le financement des PME. En parallèle, on a vu fleurir tout un tas de produits et de concepts alternatifs au bancaire. Selon mon expérience, Le financement obligataire privé a l’avantage d’être plus facile, plus discret et plus souple, on peut trouver des formules plus adaptées. En évolution, si on tente de dégager les grandes tendances, mon impression est que le financement obligataire va continuer de se développer.

Pour quels types de financements cette solution vous paraît-elle adaptée ?

Je constate en général que le réseau bancaire traditionnel pourvoit au financement du BFR. En revanche, dès qu’il s’agit de financer un projet, qu’il soit industriel ou de croissance externe, le financement obligataire est présent. Cela peut aussi être une solution dans les PME familiales, afin de désintéresser une partie de la famille qui veut sortir. Ce sont pour des projets structurants que les PME ou leurs conseils pensent à l’emprunt obligataire.

Comment expliquez-vous que cette solution soit assez peu développée en France pour les PME ?

Il y a 10 ans, le fait que les banques ne prêtent plus dans un pays où, traditionnellement c’était elles qui assuraient le financement, a été une grande novation. C’est à ce moment-là que sont nés tout un tas d’acteurs et de nouveaux produits de financement que les entreprises ont mis du temps à intégrer. Il allait faire de l’évangélisation, de la formation, etc… Il y a effectivement une méconnaissance de ces possibilités et je crois que les entreprises qui sont sur ce marché du financement, celles qui financent, doivent continuer sur la voie de cette vulgarisation, de cette évangélisation. Je suis convaincu qu’elles ont un bel avenir devant elles.

La cotation en bourse ne semble pas très adaptée pour les PME ?

Par rapport à la cotation, les statistiques de ces dernières années en France sont assez dramatiques, il y a beaucoup de retraits de la côte et pas beaucoup d’introduction, ; on se demande si c’est une tendance de fond et durable. Un thinktank que j’anime a d’ailleurs décidé récemment de faire une étude sur « Et si la bourse n’existait plus ? ». C’est à peine commencé, je ne peux pas en tirer de conclusions, ça ne serait pas sérieux ni professionnel de ma part, mais, si j’en crois la presse internationale, d’autres pays se posent la même question. On est peut-être à l’aube d’un grand bouleversement, même si c’est encore un peu trop tôt pour avoir un avis tranché sur cette question.

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